Les développements de la
microfluidique pour réaliser des laboratoires sur puces imposent de mieux
comprendre le comportement des liquides qui s’écoulement dans des canaux de
petite taille. Ainsi la taille minimale en dessous de laquelle un liquide
confiné va garder son comportement de volume est une question qui fait
polémique.
Ce qui vient d’être montré grâce à une collaboration entre notre équipe et les équipes de Cécile Cottin-Bizonne et Elisabeth Charlaix, est qu’il est possible
de faire une erreur fondamentale dans l’interprétation des données de mesure en
oubliant qu’un liquide peut déformer un
matériau aussi dur que le verre.
Sphère et plan en pyrex déformés par le liquide. |
Lors des thèses de Richard Villey et d'Emmanuelle Martinot, nous avons mesuré, en
utilisant un appareil à forces de surface (dSFA pour dynamic Surface Forces
Apparatus), la force qu’il faut appliquer pour faire osciller dans différents
liquides (mélanges d’eau et de glycérol, huiles silicones) une bille de verre
de rayon environ 3 mm au-dessus d’une petit plan de verre (1 cm x 1cm,
épaisseur 5 mm). L’amplitude des oscillations de la bille est faible (une
fraction de nanomètre) et la fréquence choisie de quelques dizaines de Hertz.
Alors que nous nous attendion uniquement à mesurer une force en phase avec la
vitesse de déplacement de la sphère et tendant vers l’infini pour des distance
sphère-plan tendant vers zéro, nous avons obtenu une partie de réponse en phase
avec la position de la sphère, ce qui est la signature d’un comportement
élastique pour ce liquide. De plus, nous n'avons pas vu de divergence de la
force visqueuse.
En fait, il a été possible d’interpréter complètement les
données expérimentales, pour l’ensemble des liquides étudiés, en faisant
l’hypothèse que les liquides gardent leurs propriétés mécaniques de volume
jusqu’à des confinements de une taille de molécule mais en prenant en compte
que lorsque le confinement devient trop important, ce n’est plus le liquide qui
s’écoule mais le verre qui se déforme.
Ce travail ouvre de nouvelles
perspectives pour comprendre les écoulements de liquides confinés dans des
situations aussi complexes que les suspensions solides concentrées (boues ou bétons) ou dans les matériaux nanocomposites
puisqu’il montre qu’on ne peut pas considérer les propriétés mécaniques de
systèmes confinés sans prendre en compte les propriétés mécaniques des surfaces
en regard…
Référence: Villey, R., Martinot, E.,
Cottin-Bizonne, C., Phaner-Goutorbe, M., Léger, L., Restagno, F., &
Charlaix, E. (2013). Effect of Surface Elasticity on the Rheology of
Nanometric Liquids. Physical review letters, 111(21), 215701. [lien]